Le peintre Jacques Poli (1938-2002) et l’écrivain Georges Perec (1936-1982) se sont rencontrés voici une trentaine d’années. C’est en effet pour le catalogue de l’exposition Peintures entomologiques (1978-1979) à la galerie Adrien Maeght en 1979 que Georges Perec écrit quatre textes : un texte sans titre «au départ, il n’y aurait qu’un accident minuscule…», Tentative d’inventaire provisoire de quelques-uns des mots évoqués par la vision des tableaux de Jacques Poli, Énumérations, 2 et enfin 11 x (11 + 11) + 11. S’y ajoute un extrait des Souvenirs entomologiques de J. H Fabre sur la Mante religieuse (Mantis religiosa). Trois ans après, Georges Perec meurt prématurément, le 3 mars 1982. Les deux artistes avaient en projet un livre autour de l’espace, à partir de 39 clichés polaroïds choisis parmi la cinquantaine que Perec avait réalisés au cours de la traversée effectuée à bord de l’Atlantic Cognac entre Le Havre et New York où il allait procéder au repérage pour le film qu’il devait faire avec Robert Bober sur Ellis Island. En vue de ce livre, Perec avait dressé une liste de treize mots, intitulée «Treize ancrages dans l’espace». La voici :
« le point
la ligne
le cercle
la voûte
les ombres
le brouillard
le temps
l’espace
le bruit
les ondes concentriques
la trace
les repères
la surface »
Jacques Poli n’avait pas oublié cette liste : «Dans mon atelier, nous nous interrogions sur la forme à donner à notre projet de travail commun. Georges tout en parlant avec moi écrivit spontanément sur un carnet à croquis la liste des Treize ancrages dans l’espace. À la lecture de ce texte, quelques images s’imposèrent à moi, je lui en fis part, il semblait d’accord…»

Bernard Magné

 

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